L’impact du moment de la journée sur la performance neuromusculaire en sport collectif

La performance en sport collectif varie selon l’heure de la journée. Cette méta-analyse explore l’influence des rythmes circadiens sur la force, l’agilité et l’explosivité des athlètes, et propose des stratégies pour optimiser l’entraînement et la compétition.
Feb 6 / Arnaud BRUCHARD

QUE RETENIR ? 

#1Performances neuromusculaires optimales en fin d’après-midi/soirée

La puissance explosive et l’agilité sont significativement plus élevées en fin de journée.
Le CMJ (Countermovement Jump) est en moyenne 5 % plus haut en soirée qu’en matinée, illustrant l’influence des rythmes circadiens sur la force et la vitesse.

#2 L’effet du moment de la journée dépend du type de test

Les tests de force isométrique et de saut squat (SJ) ne montrent pas de différence significative selon l’heure de la journée.
En revanche, les changements de direction et l’explosivité bénéficient d’une activation neuromusculaire plus efficace en soirée.

#3 Chronotype influence l’adaptation aux entraînements et compétitions

Les athlètes avec un chronotype du soir conservent des performances stables tout au long de la journée.
Les athlètes matinaux peuvent être désavantagés lors des compétitions tardives, nécessitant des stratégies d’adaptation spécifiques (échauffements prolongés, exposition à la lumière, nutrition ciblée).

Cette étude met en lumière l’importance d’une planification d’entraînement adaptée au rythme biologique
et de l’individualisation des stratégies de performance en fonction du chronotype des athlètes.

Le rôle du rythme circadien sur la performance athlétique suscite un intérêt croissant dans les domaines de la préparation physique et de la planification de l’entraînement. En sport collectif, où la réactivité, l’explosivité et la capacité à maintenir une intensité élevée sont cruciales, la question du moment optimal pour s’entraîner et performer prend tout son sens.
Cette méta-analyse explore l’effet du moment de la journée sur les performances neuromusculaires des athlètes de sports collectifs, en s’appuyant sur 10 études comparant les performances du matin (7h-10h) et celles de la fin d’après-midi/soirée (16h-20h). L’objectif est de mieux comprendre les variations physiologiques influençant les capacités motrices et d’en tirer des recommandations pour l’entraînement et la compétition.

Pourquoi la performance fluctue-t-elle selon l’heure de la journée ?

Les variations de performance au cours de la journée sont liées à plusieurs mécanismes physiologiques et neurobiologiques influencés par le rythme circadien. Ces facteurs incluent :

 La température corporelle et l'efficacité neuromusculaire

L’un des éléments les plus documentés est l’élévation progressive de la température corporelle tout au long de la journée, atteignant son pic en fin d’après-midi. Cette hausse de température est corrélée à :

  • Une meilleure conduction nerveuse, optimisant la transmission des signaux moteurs.
  • Une réduction de la viscosité musculaire, favorisant une contraction plus rapide et plus efficace.
  • Une augmentation de la compliance musculaire, réduisant le risque de blessure et améliorant l’élasticité.

En d’autres termes, un corps mieux préparé physiologiquement répond plus efficacement aux sollicitations explosifs en fin de journée.

 L’influence des hormones sur la force et l’explosivité

Les hormones jouent un rôle majeur dans l’expression de la force et de la puissance musculaire :

  • Le cortisol, hormone du stress, suit un cycle circadien avec un pic matinal qui peut nuire aux performances explosives.
  • La testostérone, essentielle au développement de la force et de la récupération musculaire, atteint souvent son pic en fin de journée, favorisant un meilleur engagement musculaire.

 Le chronotype individuel

Tous les athlètes ne réagissent pas de la même manière au moment de la journée. Certains sont naturellement plus performants le matin (chronotype matinal), tandis que d’autres atteignent leur pic de performance en fin de journée (chronotype vespéral). Cette distinction individuelle est cruciale dans l’interprétation des résultats et dans l’adaptation des stratégies d’entraînement.
La performance neuromusculaire fluctue au cours de la journée, avec un pic de puissance et des tests d’agilité montrant des améliorations significatives en fin d’après-midi et en soirée.
 

Quels paramètres de performance sont affectés par l’heure de la journée ?

Les résultats de cette méta-analyse montrent des différences significatives entre la matinée et la soirée sur plusieurs paramètres neuromusculaires :

  Des gains notables sur les performances explosives en soirée
Les tests réalisés montrent que les performances en saut et en agilité sont significativement meilleures en fin d’après-midi :

  • Le saut avec contre-mouvement (CMJ) affiche une amélioration de +5% en soirée par rapport au matin, illustrant un gain en puissance musculaire.
  • Les tests d’agilité et de changement de direction montrent une progression moyenne de 7% en soirée, attribuée à une meilleure activation neuromusculaire et une coordination optimisée

. Des performances stables sur d’autres paramètres
En revanche, certaines mesures n’ont pas montré de différences notables selon l’heure de la journée :

  • Le saut squat (SJ) ne semble pas être influencé par l’heure d’exécution.
  • La force isométrique mesurée par préhension manuelle reste constante tout au long de la journée, suggérant que les capacités purement musculaires brutes sont moins impactées par le rythme circadien.
analyse statistique
Ces analyses statistiques mettent en évidence l’influence du moment de la journée sur la performance neuromusculaire des athlètes de sports collectifs. Elles comparent les capacités physiques entre le matin et l’après-midi sur quatre critères : le saut avec contre-mouvement (CMJ), l’agilité, le squat jump (SJ) et la force isométrique.

 Amélioration des performances explosives et de l’agilité en fin de journée
Les résultats indiquent une amélioration significative de certaines qualités neuromusculaires en fin d’après-midi :

  • La hauteur du CMJ est supérieure en fin de journée, montrant une meilleure efficacité du cycle étirement-raccourcissement.
  • Les performances en agilité sont également meilleures l’après-midi, traduisant une activation neuromusculaire optimisée et une coordination améliorée.

Ces variations sont notamment expliquées par l’élévation de la température corporelle, qui favorise une meilleure conduction nerveuse et un recrutement musculaire plus efficace.

 Stabilité de la force isométrique et du squat jump selon l’heure de la journée
À l’inverse, certains paramètres montrent peu ou pas de variations significatives entre matin et soir :
  • Le Squat Jump ne présente pas d’amélioration marquée, suggérant que les performances sans cycle étirement-raccourcissement sont moins sensibles aux fluctuations circadiennes.
  • La force isométrique ne varie pas significativement, indiquant que la production de force maximale brute n’est pas affectée par l’heure de l’effort.
  • Conséquences pratiques pour l’entraînement et la compétition
  • Optimisation des séances de haute intensité en fin d’après-midi pour maximiser l’explosivité et la réactivité.
  • Préparation spécifique pour les efforts matinaux, incluant un échauffement prolongé et une activation musculaire plus progressive.
  • Individualisation de l’entraînement en fonction du chronotype de l’athlète pour tirer parti de ses pics de performance naturels.
La hauteur du saut avec contre-mouvement (CMJ) était en moyenne 5 % plus élevée en soirée qu’en matinée, mettant en évidence l’influence des rythmes circadiens sur la puissance explosive
 

Conséquences pour la planification de l’entraînement

 Faut-il privilégier les entraînements intensifs en fin de journée ?

Les résultats suggèrent que pour les disciplines où l’explosivité, la réactivité et l’agilité sont essentielles (football, basket, handball, rugby), il pourrait être bénéfique d’organiser les séances les plus intenses en fin d’après-midi ou en soirée. Cela maximise le rendement neuromusculaire et réduit les risques de blessure liés à une température corporelle insuffisante.

 Comment optimiser la performance en matinée ?

Dans certains cas, les athlètes n’ont pas le choix du moment d’effort (matchs matinaux, entraînements imposés). Pour atténuer les effets d’une performance réduite le matin, plusieurs stratégies peuvent être mises en place :

  • Échauffements prolongés et progressifs, intégrant des exercices neuromusculaires spécifiques pour activer les voies nerveuses.
  • Exposition précoce à la lumière naturelle pour stimuler l’éveil physiologique.
  • Optimisation nutritionnelle, avec une attention particulière portée aux apports énergétiques et hydriques avant un effort matinal.

 Adapter l’entraînement aux chronotypes des athlètes

L’un des points essentiels de cette étude est l’impact du chronotype individuel. Pour les sportifs vespéraux, l’adaptation est plus facile car leurs performances sont naturellement meilleures en soirée. En revanche, les athlètes matinaux pourraient mieux performer en début de journée, indépendamment des tendances générales.

L’entraînement personnalisé selon le profil circadien de l’athlète pourrait ainsi optimiser la progression individuelle et minimiser la fatigue liée aux décalages horaires d’entraînement ou de compétition.
Les athlètes avec un chronotype du soir pourraient présenter moins de variations de performance au cours de la journée, tandis que les individus matinaux pourraient rencontrer des difficultés lors des compétitions en fin de journée.
 

CONCLUSION

CONCLUSION

CONCLUSION

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CONCLUSION

CONCLUSION

Cette méta-analyse met en évidence une amélioration des performances neuromusculaires en fin d’après-midi et en soirée, particulièrement pour les tests nécessitant de la puissance explosive et de l’agilité. Cette amélioration s’explique par une hausse de la température corporelle, une activation neuromusculaire optimisée et un environnement hormonal plus favorable.

Toutefois, ces observations doivent être adaptées à chaque athlète, en tenant compte de son chronotype individuel et de sa capacité d’adaptation aux contraintes horaires. Pour les compétitions matinales, une stratégie spécifique d’optimisation de l’éveil physiologique et neuromusculaire peut compenser cette baisse naturelle de performance.

En somme, si l’après-midi et la soirée restent des créneaux idéaux pour maximiser la performance en sport collectif, l’individualisation du suivi et la gestion du rythme circadien doivent être intégrées dans la planification de l’entraînement et des compétitions pour garantir une performance optimale.

L'article

Mina, M. A., Farooq, A., & Granacher, U. (2024). Influence of time-of-day on neuromuscular performance in team sport athletes: A systematic review and meta-analysis. Frontiers in Sports and Active Living, 6, 1466050. https://doi.org/10.3389/fspor.2024.1466050